Soutenir les premiers intervenants*

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Les premier intervenants

Les premier intervenants, tels que policiers, pompiers ou ambulanciers, sont exposés quotidiennement à des situations potentiellement mortelles. Ce contact permanent avec un flot d’agressions, de violences et de dangers est très pénible, et peut avoir une incidence nocive sur leur santé au fil du temps, l’effet produit pouvant continuer à se faire sentir longtemps après un évènement.

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Être témoin d’un évènement traumatisant ou en vivre un n’est pas chose rare : des études montrent que la moitié d'entre nous connaîtra au moins un traumatisme important au cours de sa vie. Le syndrome de stress post-traumatique est une réaction normale à des évènements tels qu’un accident d’automobile, une catastrophe naturelle ou une agression physique. De telles épreuves peuvent provoquer des émotions intenses et effrayantes. Ces émotions risquent de causer un stress immense non seulement à la personne qui survit à l’évènement, mais aussi à celle qui en est témoin ou qui lui porte secours.

Qu’est-ce que le TSPT?

Le trouble de stress post-traumatique (TSPT) est un état de santé mentale lié à des troubles de l’anxiété déclenchés par une expérience traumatisante vécue ou dont on a été témoin. L’impact d’un évènement traumatisant sur un individu diminue normalement au fil du temps, après quoi celui-ci est en mesure de reprendre sa vie normale. Pour certains cependant, l’expérience peut entraîner des symptômes à long terme qui viennent perturber le fonctionnement de leur vie quotidienne. Il s’agit alors du TSPT.

Ce ne sont cependant pas toutes les victimes d’un traumatisme qui développeront un TSPT.On estime que 9,2 % des Canadiens connaîtront des symptômes du TSPT au cours de leur vie1.

Les symptômes

Bon nombre de victimes d’évènements traumatisants peuvent avoir des difficultés d’adaptation temporaires, mais leurs symptômes s’estompent avec le temps et une bonne hygiène de vie. Si par contre leurs symptômes s’aggravent, durent des mois, voire des années, et nuisent à leurs activités quotidiennes, il se peut que le TSPT soit en cause. Pour les premiers intervenants, ces symptômes peuvent avoir des conséquences graves sur leur travail. Le présentéisme, un mot qui désigne le fait d’être physiquement au travail mais de ne pas pouvoir fournir son plein rendement, est une préoccupation majeure chez les premiers intervenants en raison de la nature de leur travail.

Les symptômes du TSPT apparaissent généralement au cours du mois suivant un événement traumatisant, quoiqu’ils puissent parfois ne survenir que des années plus tard. On les regroupe généralement sous quatre catégories : souvenirs intrusifs, évitement et engourdissement, pensées négatives et sautes d’humeur, et modifications des réactions physiques ou émotionnelles. Les symptômes peuvent varier au fil du temps et selon la personne atteinte, et peuvent comprendre les suivants2 :

Souvenirs intrusifs :
  • souvenirs bouleversants et envahissants de l’événement
  • rappels d’images ou flashbacks (impression de revivre l'évènement traumatisant)
  • cauchemars (au sujet de l’évènement ou d’autres choses effrayantes)
Évitement et apathie :
  • le fait d’éviter des activités et des lieux, ou de réprimer des pensées ou des sentiments qui rappellent le traumatisme
  • incapacité à se souvenir d’aspects importants de l’événement traumatisant
  • perte d’intérêt pour des activités et la vie en général
  • sentiment de détachement et d’apathie émotionnelle
Pensées négatives et humeur inégale :
  • sentiment de culpabilité ou de honte
  • sentiment de solitude et d’aliénation
  • sentiment de méfiance et de trahison
  • difficulté à se concentrer ou trous de mémoire
  • dépression et désespoir
Réactions physiques ou émotionnelles :
  • troubles du sommeil
  • irritabilité, accès de colère, comportements autodestructeurs ou imprudents
  • nervosité et fébrilité

Le traitement

Le Programme de traitement du stress post-traumatique (PTSPT) du Centre de santé Homewood est l'un des rares programmes hospitaliers du genre au Canada. Ce programme facilite la guérison des séquelles d’un traumatisme et du TSPT en aidant les patients à développer des habiletés de gestion des symptômes visant à les ramener à la vie normale.

Selon Charlene O'Connor, associée en recherche clinique, la pierre angulaire du PTSPT est un milieu thérapeutique où les clients peuvent bénéficier du soutien de leurs pairs pendant leur rétablissement. Au sein de cette communauté thérapeutique, des membres du personnel formés en traumatologie dans les disciplines connexes de la santé, notamment les soins infirmiers, le travail social, l'ergothérapie, la psychologie, la psychothérapie et la ludothérapie, offrent des thérapies en petits groupes.

« Ce programme à volets multiples offre des thérapies fondées sur des données probantes, telles que la gestion des émotions, la thérapie de traitement cognitif, la pleine conscience, la formation à l'efficacité interpersonnelle, et l'exploration ludique et somatique. Les clients participent également à des séances de thérapie individuelle avec un psychiatre et leur thérapeute principal, ajoute-t-elle.

« Le PTSPT comprend un processus d'évaluation complet pendant la première semaine, et l'évaluation ne se limite pas à l'intensité et à la fréquence des symptômes du TSPT. Ceux-ci sont évalués en même temps que les symptômes qui y sont souvent associés, comme la dépression, l'anxiété, la dissociation, la consommation de substances psychoactives, les dommages psychologiques, la colère, l’alexithymia, la culpabilité et la honte liées au traumatisme, et les capacités fonctionnelles. Nous administrons notre batterie de tests standard pendant la première semaine du programme et à nouveau au moment du départ du client afin d’obtenir des indicateurs fiables de changement », conclut-elle.

Le PTSPT a permis à Natalie Harris, ambulancière paramédicale en soins avancés de l’Ontario, d’apprendre les compétences dont elle avait besoin pour se remettre des effets du TSPT provoqués par la nature de son travail. Natalie est une intervenante passionnée en santé mentale, étant elle-même une survivante du trouble de stress post-traumatique, de la toxicomanie et d’une tentative de suicide. Natalie a quitté son poste d’ambulancière et sensibilise maintenant les gens aux problèmes des premiers intervenants aux prises avec le TSPT sur son blogue « Le parcours en santé mentale de l'ambulancière Natalie ». Elle a également écrit un livre intitulé Save-My-Life School: A first responder’s mental health journey (L’école qui m’a sauvé la vie : le parcours en santé mentale d’une ambulancière).

« Homewood m'a appris qu’il était normal de ressentir ces émotions, qu’elles finiraient par passer et que je ne devrais pas accorder une réalité permanente à des choses temporaires. Elle m'a enseigné ce qu’était la codépendance, ainsi que la façon d’en guérir et de considérer mes besoins comme légitimes. Elle m'a montré l'extrême importance du soutien des pairs et la façon dont celui-ci peut ouvrir mon esprit à la possibilité d’une croissance post-traumatique. Elle m'a appris en outre à guérir de la culpabilité ressentie à cause de ma dépendance et à être la meilleure maman possible. Mais surtout, elle m'a appris que le fait de parler de sa blessure émotionnelle est le secret de la guérison ».

La recherche

La loi C-211, une loi d'intérêt public émanant d'un député adoptée le 14 juin 2018, propose de mener et de rassembler des recherches fondées sur des données probantes afin de fournir des soins appropriés à tous les premiers intervenants, agents de communication, travailleurs correctionnels et militaires dans l’ensemble du Canada. Elle proposera également une terminologie commune relative au TSPT et cherchera à fournir des soins opportuns à tous les héros des différentes collectivités canadiennes. Cette loi place le Canada en position d’avant-garde en matière de traitement du TSPT.

Le Centre de santé Homewood collabore étroitement avec l’Institut de recherche Homewood (IRH), un organisme sans but lucratif engagé dans une recherche qui transforme l'évaluation et le traitement de la santé mentale au Canada. Cette collaboration permet aux clients et au personnel du PTSPT de mieux comprendre le TSPT, d’y sensibiliser le monde entier et de développer de nouveaux traitements pour le soigner.

Le Centre de santé Homewood se penche actuellement sur la compréhension des besoins particuliers des premiers intervenants en matière de traitement. Par exemple, les dommages psychologiques dont ils sont victimes ou la stigmatisation à l’égard des personnes qui sont aux prises avec des problèmes de santé mentale. Homewood recueille des données à la fois quantitatives et qualitatives afin d'éclairer sa compréhension des besoins en traitements adaptés aux premiers intervenants en vue d’élaborer un programme spécialisé à leur intention. Cela signale une phase passionnante de la recherche de Homewood, précurseure de soins de santé mentale novateurs fondés sur des données probantes à l’intention des premiers intervenants.

Réduire la stigmatisation

Grâce en partie à la législation et à l’intérêt croissant des médias, la sensibilisation du public et l'acceptation du milieu de travail continuent de croître à l’égard des personnes qui souffrent du TSPT. Pourtant, il reste beaucoup à faire pour sensibiliser la population et promouvoir une discussion ouverte dans l’optique de la prévention et de l’intervention.

Selon Natalie Harris, « les équipes de soutien par les pairs ont augmenté au sein des effectifs de premiers intervenants après que la législation provinciale les eût enjoint de leur fournir cette aide. De nombreux premiers intervenants sont formés aux premiers soins en santé mentale et suivent des cours comme le programme En route vers la préparation mentale (Commission de la santé mentale du Canada), ce qui est très bien, mais il faudra encore du temps pour que la stigmatisation à l’égard de la maladie mentale et des blessures psychologiques disparaisse et que les premiers répondants utilisent le soutien offert, ajoute-t-elle.

« Actuellement, le soutien post-traitement varie d'une organisation à une autre, mais, poursuit Mme Harris relativement au soutien à la famille, même si Homewood offre un excellent suivi, qui favorise la réintégration au milieu familial, il faudrait davantage de groupes de soutien par les pairs dans le milieu familial accessibles à tous sur une base régulière ». Des groupes de soutien par les pairs, comme Wings of change, cherchent à organiser des rencontres de pairs en milieu familial, mais ses ressources sont trop limitées actuellement pour y donner suite.

En plus du PTSPT de son Centre de santé, Homewood propose des programmes spécialisés en traitement des traumatismes et du TSPT dans les services ambulatoires de ses Cliniques de Vancouver, Calgary, Edmonton et Mississauga.

* Dans ce document, le masculin est employé comme genre neutre.

Médiagraphie :

  1. CBC The Nature of Things. (le 19 janvier 2017). « PTSD: Canada Has The Highest Rate, Plus Eight More Surprising Facts ». Extrait le 22 mars 2018 du site http://www.cbc.ca/natureofthings/features/ptsd-can...
  2. Smith, M., Ph.D., Robinson, L., Ph.D., & Segal, J., Ph.D. (janvier 2018). Post-traumatic stress disorder (PTSD). Extrait le 22 mars 2018 du site https://www.helpguide.org/articles/ptsd-trauma/pts...